L’article L 113-2 du Code des assurances enjoint à l’assuré de répondre avec exactitude aux questions que lui pose l’assureur, lors de la conclusion du contrat, en vue de se forger une opinion des risques qu’on lui propose de couvrir.
L’article L 113-8 du même code assortit cette obligation de déclaration d’une sanction radicale en prescrivant la nullité de la police lorsque le candidat à l’assurance a sciemment apporté des réponses inexactes.
L’article L 112-3 al.4 du Code des assurances interdit cependant à l’assureur de se prévaloir du fait qu’une question exprimée en termes généraux n’a reçu qu’une réponse imprécise lorsque, avant la conclusion du contrat, il a posé des questions par écrit à l’assuré, notamment par un formulaire du risque ou par tout moyen.
Par une chambre mixte du 7 Février 2014, la Cour de cassation a mis un terme à la pratique – alors courante – des déclarations pré-imprimées (et pré rédigées) que l’assuré était supposé faire siennes en apposant sa signature au bas du document pré rempli qu’il n’avait souvent pas lu (Cass. Ch. Mixte 7 février 2014, n° 12-85107, Resp. civ. Et assur. 2014 comm. 99 note Groutel).
Elle a indiqué que « l’assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci interroge, lors de la conclusions du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu’il prend en charge ; (…) l’assureur ne pouvant se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l’assuré que si celles-ci procèdent des réponses qu’il a apportées audites questions ».
La doctrine s’est interrogée : cela implique-t-il de faire remplir aux assurés de manière systématique des questionnaires écrits ?
La Cour de cassation avait indiqué à plusieurs reprises que l’assureur n’est pas tenu de procéder par voie de questionnaire écrit – ni d’établir par écrit qu’il s’est conformé à l’obligation d’interroger le futur assuré (Cass. 2éme civ., 14 avril 2016, n° 15-18226 RGDA juillet 2016 n°113q3), ce qui ne résulte effectivement d’aucun texte législatif.
Ainsi dans une décision du 8 mars 2018, (Cass. 2éme civ, n°17-11676 RGDA n°5 – Mai 2018) la Cour de Cassation a approuvé une Cour d’Appel d’avoir prononcé la nullité d’une police d’assurance de RC Auto, alors que l’assureur ne produisait aucun questionnaire rempli par l’assuré – mais produisait des informations précises et individualisées démontrant qu’il avait bien interrogé le souscripteur.
La doctrine critique la jurisprudence de 2014 : en effet le texte de l’article L112-3 al.4 du Code des assurances interdit à l’assureur :
- de se prévaloir d’une question exprimée en termes généraux ;
- qui n’a reçu qu’une réponse imprécise.
Aujourd’hui on impose à l’assureur (si l’on suit la jurisprudence de 2014) de poser des questions précises – ou de se prévaloir de réponses précises.
Or le texte ne devrait pas empêcher l’assureur de contester des réponses erronées ou des déclarations de mauvaise foi – même si la question/ou la réponse n’est pas précise.
La « précision » devient donc une condition d’application des articles L 113-2, L113-8 et L 112-3 al.4 du Code des assurances.
Un autre éclairage a été apporté par un arrêt du 4 octobre 2018 selon lequel le Juge doit rechercher si la fausse déclaration proviendrait ou non d’une inexactitude qui trouverait son origine dans « une réponse personnellement donnée par l’assurée à une question précise de l’assureur».
Tout l’intérêt et le danger de cet arrêt repose sur les mots d’une réponse « personnellement » donnée par l’assurée.
En effet, en précisant ainsi la nature de la réponse de l’assuré, la Cour de Cassation permet de ne pas sanctionner l’assuré qui ne démentirait pas ce qui serait imprimé à l’avance dans les questionnaires remis par l’assureur.
De ce fait, le mensonge par omission est donc aujourd’hui sans conséquence. Seul le mensonge exprimé par l’assuré pourrait entrainer une nullité du contrat d’assurance selon la Cour de Cassation.
Cette quête de la « précision » est confirmée par un arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la Cour de cassation, qui confirme que la nullité du contrat ne peut être prononcée sans constater que « l’assureur avait, lors de la conclusion du contrat, posé à l’assuré des questions précises impliquant la révélation des informations relatives à la construction de l’immeuble assuré qu’il lui était reproché de ne pas avoir déclarées » (Cass. 2éme civ, 13 décembre 2018, n° 17-28093, F-PB).
Il s’agissait en l’espèce, de l’omission de déclarer que l’immeuble avait été édifié sans permis de construire, sur une zone interdite…
Certains y voient une amélioration du régime de la fausse déclaration intentionnelle, les assureurs pouvant désormais solliciter l’annulation du contrat pour faire sanctionner le refus de l’assuré de divulguer des informations importantes (celles qui doivent être divulguées si l’assuré répond honnêtement aux questions posées).
Mais il faut bien reconnaître que cette solution implique pour les assureurs, de s’interroger sérieusement lors de la rédaction de leurs questionnaires, sur la nature des questions précises à poser. L’assureur doit lui-même se poser les bonnes questions, selon le type d’assurance envisagée, avant de rédiger son questionnaire. Il ne faut en effet poser que celles qui impliquent la révélation d’informations pertinentes ( !).